American Rhapsody
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mercredi 8 février 2017
in Stormy Weather

La valeur travail

Il y en a qui se brisent le dos à accomplir des tâches ingrates. D'autres qui se lèvent avant le soleil pour faire pousser des choux-fleurs et des vaches et croulent sous les dettes. Et puis des qui gagnent un salaire annuel à cinq chiffres à brasser du vent avec des intitulés de poste en franglais indécent. D'autres, même, qui engrangent des centaines de milliers d'euros pour poser de temps en temps leur postérieur sur un fauteuil douillet.

Puis plein entre les deux ; des qui travaillent assis au chaud mais à des tâches de plus en plus vides de sens, ou sous la houlette d'un supérieur qui leur pourrit la vie.

Il y a ceux qui sont maîtres d'eux-mêmes, ils sont à leur compte, et qu'importe s'ils font en fait l'équivalent de deux temps plein, avec bien peu de droits en retour, pour louer leur studette so chic ?

Des qui élèvent des gosses, nettoient une maison, changent les couches d'un parent, distribuent des repas chauds ou tentent de rendre notre monde un peu moins dur à vivre, sans la moindre rétribution pécuniaire. D'autres encore qui ne les voient pas trop grandir, leurs enfants, à faire deux heures de route le matin et deux heures le soir.

Il y a les chanceux, les comme moi, ceux qui sont quand même plutôt bien payés à faire des trucs qui leur plaisent. Il y a bien quelques frustrations du quotidien, des ambitions qui manquent de moyens, les désaccords occasionnels avec la direction, et des collègues qui parfois n'ont rien d'autre à faire là que de nous mettre des bâtons dans les roues, mais nous pouvons entendre parler d'accomplissement par le travail sans avoir directement envie de flanquer un coude ou deux dans le grand sourire du jeune requin qui s'en gargarise.

Sauf que même à nous on essaie de faire croire c'est normal, quand on aime, de ne pas compter. Que nos places si prisées sont chères et qu'il faut être sûrs de continuer à les mériter. Que c'est super, de tellement aimer son taf qu'on y fait sa vie sociale, sa gym, ses lessives et ses repas, voire qu'on y habite. Des menottes dorées.

Et puis bien d'autres encore.

Nos salaires ne reflètent ni la valeur ni la difficulté de nos contributions à la société, et ne le feront manifestement jamais. Pourquoi alors s'obstiner à présenter le plein emploi comme le Graal du prolétaire ?

Le revenu universel, surtout tel qu'il nous est présenté maintenant, n'est pas une solution parfaite. Comment le mettre vraiment en place, au détriment de qui et de quelle ligne budgétaire ? Mais qu'on cesse de m'agiter sous le nez le vilain spectre de l'assistanat. Ma morale s'accommode mieux de donner les moyens de vivre décemment à des gens qui ne feraient rien en retour (et c'est dur, de ne rien faire, le sachiez-tu) que des batteries de cuisines des bons représentants du peuple.

Voilà en tout cas une vision qui m'inspire : celle d'une société qui admettrait enfin qu'elle ne récompense pas le travail au mérite (fut-il de fournir un travail ingrat, un travail indispensable, un travail productif ou un travail qualifié), et que le travail ­– tel qu'on le conçoit aujourd'hui – n'est ni la seule ni la meilleure façon de donner de la valeur aux individus ou du sens à leur vie.

Et que ceux qui affirment que l'important, c'est de travailler s'étouffent dans leur hypocrisie.

(J'admets cependant ne pas être emballée par l'idée de taxe robot : pourquoi taxer, i.e. pénaliser, une solution qui nous libère de tâches automatisables et nous laisse plus de temps pour contribuer autrement ? Il y a une vision de l'homme contre la machine qui me laisse perplexe. On me dit que c'est les bénéfices engrangés par l'économie faite sur les embauches qui sont taxés, mais pourquoi ne pas appeler ça une taxe sur les bénéfices ?)

jeudi 26 janvier 2017
in Stormy Weather

Roulée en boule

Donald Trump, les morts dont il va être responsable, lui, avec son gouvernement, et les députés et sénateurs de son bord, très rapidement à coups de déni d'accès aux soins en général et à l'IVG en particulier, un peu moins vite à force de s'en mettre plein les fouilles sur le dos des pauvres, des réfugiés, de la planète.

La marche « pour la vie », la vie de qui, on ne sait pas trop ; pas celle des femmes, en tout cas. Ça va de pair avec la manif « pour tous » (sauf tous les panous) et, mon préféré, « sens commun ». Je sais pas toi mais moi quand les gens se mettent à utiliser des mots aux hasard comme s'ils pouvaient prendre n'importe quel sens hop voilà, je me méfie.

Ce pauvre violeur d'enfants de Roman Polanski que les méchantes féministes ont rendu très triste à pas trouver normal qu'on lui fasse des haies d'honneur, et tous les dégueulasses qui le soutiennent.

Les scandales de corruption[1] qui s'égrainent en France comme autant de jours de la semaine.

Manuel Valls[2].

Tout autant de raisons (et il y en a encore bien d'autres, la Syrie, la Turquie, Poutine, pour ne citer que les premières qui me viennent à l'esprit, et sans citer les personnelles) d'avoir très très envie de rester roulée en boule pour toujours sous une couette. Ce qui n'est malheureusement ni possible ni même une excellente idée (le repli sur soi bla bla bla), mais qui me paraît quand même une excellente perspective à court terme, par exemple en écoutant la sonate pour alto seul de György Ligeti interprétée par Tabea Zimmermann (pour qui elle a été écrite en 19981994).

Ce qui servira d'ailleurs de fiat lux pour ma nouvelle photo de profil sur le Touittère.

Notes

[1] Alors moi j'ai tendance à tout appeler corruption, mais le terme correct pour parler de l'enquête ouverte par le parquet financier sur Pénélope Fillon, c'est « détournement de fonds publics, abus de biens sociaux, et recel de ces délits », si tu veux écrire une jolie chanson dessus.

[2] J'avais commencé un paragraphe sur l'islamo-gauchisme, la « laïcité » — encore un mot dont on dirait qu'il n'avait pas déjà un sens avant que tout le monde ne se metter à lui en donner un nouveau — à la Caroline Fourest , et la peur que j'ai de lui, mais finalement, « Manuel Valls », ça se suffit à soi tout seul, je trouve.

mercredi 6 avril 2016
in 'S Wonderful

La magie

Il parait que l'enfance, c'est magique.

Au point donc que des parents se plient en quarante-cinq pour s'assurer que l'enfance de leurs rejetons la soit vraiment. Magique, je veux dire.

Puisqu'elle a un peu de mal à y arriver toute seule.

Bien que ce soit magique par essence, l'enfance.

Bref, je crois que tu vois où je veux en venir.

Du coup je me suis un peu énervée.

Ma vie d'adulte n'est pas plus exempte de magie que mon enfance. Au contraire...

La magie, c'est de sentir les larmes rouler sur mes joues en écoutant de la musique. C'est de regarder le soleil tenter de se coucher au large de l'Islande, derrière trois gamins avec leurs instruments. C'est de conduire dans une lumière crépusculaire pendant des heures et ne croiser que des moutons. C'est de lire le mot « piadina » sur la devanture d'un petit restaurant engoncé dans une ruelle et d'être immédiatement transportée vers une chaude matinée de juin et des éclats de rire. D'entendre un accent russe se déverser dans le téléphone et d'aussitôt sentir un mélange de cuir et de cigarette. C'est les frissons provoqués par un simple baiser dans le cou. C'est les vagues qui me submergent sous une caresse, un regard. C'est de voyager vers d'autres contrées, d'autres univers, d'autres vies en ouvrant un livre, en se plongeant dans quelques paragraphes. C'est le sourire d'un enfant, ses bras tendus pour un câlin. C'est une vieille chienne borgne qui vient poser sa tête sur mes pieds au moment où j'en ai le plus besoin. C'est les rencontres fortuites, les amitiés nouées instantanément. C'est de s'endormir en écoutant le bruit des vagues sur la plage. C'est le réconfort de certaines tasses de thé. C'est d'entendre, parfois, dans ma tête, des voix qui ne sont plus et qui me font du bien.

C'est tout ça, et bien plus encore.

Et ça ne s'achète pas en magasin.

jeudi 10 mars 2016
in 'S Wonderful

(Czech) Rhapsody

Trop peu de temps, entre deux orchestres, une étudiante enthousiaste, de la science, des projets à foison... Mais, néanmoins, l'occasion de me réjouir d'avoir trouvé un gynécologue qui semble assez convaincu que mon corps, mon choix, tant qu'il me donne les informations pour choisir.

Fiat lux

mercredi 24 février 2016

Wearing colored contacts to match your dresses

Des réveils en douceur et un bassoniste en vacances qui venait me chercher à la sortie du travaillement.

Un oratorio de Haydn. Une sonate de Schubert. Le Sacre. Plein de places de concert.

Des projets de voyages printaniers. Ligurie, Bordeaux, Tel-Aviv, Barcelone, Prague, Germanie.

[+]

Je lis

Surtout des polars. À l'occasion, des romans de fantasy loufoque, du théâtre, de la littérature chinoise traduite en italien (j'ai des amis formidables), des vrais livres bien écrits.

J'écoute

of Montreal, Caravan Palace, the Ditty Bops, Dango Reinhardt, the National, Minor Majority, Léo Ferré, Beethoven, Sonny Rollins, Laura Marling, Erlend Øye, Hjaltalin, Sufjan Stevens, Yuri Bashmet. Entre (nombreux) autres.

Je suis

occupée ouh là beaucoup très très, enchantée par Oscar Wilde (One should always be a little improbable), vaguement improbable, toujours aussi liberté, égalité, schtroumph 1er (merci Plantu).

Pensée profonde

"Partir, c'est mourir un peu. Mais mourir, c'est partir beaucoup."
[Alphonse Allais]

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