C'est une histoire qui a commencé il y a quelques semaines. On a soudain appris que le lycée agricole d'Itawamba, dans le Mississippi, voyait d'un tel mauvais œil qu'une de leurs élèves, Constance, veuille se présenter au bal de fin d'année (le fameux bal de prom' dont les films hollywoodiens nous gavent) accompagnée non d'un adolescent boutonneux mais d'une adolescente potentiellement tout aussi acnéique (détail que les journaux ont, de manière surprenante, passé sous silence) qu'ils ont décidé d'annuler le dit bal. Un bal de prom' n'est pas l'endroit où afficher sa dépravation lesbianique, enfin.
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D'ailleurs, on lui refusait aussi le droit de se présenter au dit bal en costume trois pièce plutôt qu'en robe de soirée.
Et pas n'importe quelle robe, je suppose, au vu des récents déboires des quelques élèves du lycée d'Oxford (dans l'Alabama, ne confondons pas) qui, ayant osée se présenter à leur bal de prom' vaguement décolletées, se sont retrouvées sévèrement réprimandées et à devoir choisir entre quelques jours d'exclusion et... un châtiment corporel[1].
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Et puis tant qu'on y est à parler de bals de prom' dans le Sud profond des États-Unis, il me faut mentionner l'exemple du lycée de Turner County (en Géorgie), qui a attendu 2007 pour avoir son premier bal de prom' intégré, c'est-à-dire où Blancs et Noirs soient ensemble plutôt que d'assister à des fêtes séparées.
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Pour en revenir à Constance, l'affaire a fait beaucoup de bruit dans l'Internet mondial, la demoiselle a été invitée à des émissions télévisées, en particulier celle d'Ellen DeGeneres, la lesbienne préférée des Américains, et bien vite on apprenait que puisque le bal de prom' du lycée était annulé, les parents d'élèves en organisaient un eux-mêmes pour leurs chérubins, auquel Constance et sa petite amie étaient bien évidemment invitées.
Toutes ces histoires de bal de prom' remontaient à la surface, les bras m'en tombaient, et j'essayais de ne pas trop leur prêter attention tellement je les trouve perturbantes, exemples trop parfaits de ce qui va mal dans ce pays, et cibles trop faciles de mon indignation.
Et puis j'ai appris ce soir que le bal auquel Constance et son amie ont été invitées, ben, c'était pas un vrai bal. C'était un fake. Il n'y avait qu'elle, son amie, et cinq autres lycéens (dont au moins deux parias en difficulté d'apprentissage), plus quelques profs pour chaperonner le tout. Pendant ce temps, le reste du lycée faisait la bamba dans un endroit tenu secret, bien à l'abri de tout ce lesbianisme malsain. Et à qui voudrait invoquer la cruauté des adolescents les uns envers les autres, je tiens à rappeler que la vraie soirée était organisée par leurs parents.
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Alors certes, j'ai les nerfs un peu à fleur de peau, en ce moment. Et j'ai moi-même un lourd passé de fille pas-comme-les-autres, et encore aujourd'hui parfois des difficultés à être toujours sûre que les gens m'invitent à leurs soirées pour de vrai plutôt que pour se moquer de moi. Mais en lisant cet article, j'ai été choquée de la cruauté de ces lycéens et de leurs parents ; et pour Constance, son amie, et la poignée d'ados qui se sont pointés à la mauvaise adresse, j'ai pleuré.