Bon alors on ne rigole pas beaucoup avec la sécurité, quand un ancien Président des Zétazunis vient causer de la situation au Proche Orient.

Pas de téléphone portable, pas de sac à main, juste deux pièces d'identité et le sacro-saint billet. Du moins, en théorie ; en pratique, interdire un sac à main aux femmes, ça n'est apparemment pas raisonnable. La moitié d'entre elles en avaient un, dont certains d'un gabarit plutôt corsé. Ceci étant, il y avait des gardes partout plus des renforts de police locale, un passage au détecteur de métaux à l'entrée (d'ailleurs, cette fois, on n'était pas séparés selon le genre afin que les filles se fassent examiner par des madames et les garçons par des gros malabars costauds - c'était malabars pour tout le monde). J'ai ensuite compté neuf « agents de sécurité » sur ou autour de la scène, plus deux flics.

Rappelons qu'un Président des Zétazunis se voit affligé d'un service de sécurité à vie et ne peut pas aller pisser tranquille même lorsque son mandat a expiré depuis plus de vingt ans ; franchement, Président des Zétazunis, c'est pas une vie.

Les festivités étaient divisés en trois parties. D'abord, une introduction afin de rappeler aux tête-en-l'air que James Earl Carter était le trente-neuvième Président des Etats-Unis, en exercice de 1977 à 1981, prix Nobel de la Paix 2002, et qu'il a fait (et fait encore) plein de trucs bien dans le vaste monde. Ca m'a donné encore une fois l'occasion de me dire que ça serait pas plus mal de s'occuper des Etats-Unis[1], mais en même temps qu'espérer du mec qui a mis à la mode pour les présidents américains de s'occuper de la démocratie dans le monde ? Ensuite, un discours d'une vingtaine de minutes du monsieur. Enfin, un « dialogue » entre étudiants et Président, autrement dit, la réponse du monsieur à une dizaine de questions sélectionnées parmi celles soumises au préalable par des élèves à un obscur comité, et lues alternativement par deux professeurs.

Je dois bien avouer que j'ai été globalement déçue. Je suis relativement nulle en conflit israélo-palestinien. (A ce sujet, rien ne m'énerve plus que de m'entendre dire qu'ayant une ascendance partiellement juive, je suis supposée soutenir aveuglement toute action d'Israël et rêver de faire des choses à Ariel Sharon. Surtout que personne ne remet en cause mon droit à ne pas cautionner toutes les actions de la France et à ne pas fantasmer sur Jacques Chirac.) Je m'attendais donc à un aperçu d'idées plus subtiles et recherchées que les miennes ; et la position principale de M Carter, à savoir qu'il faudrait qu'Israël accepte de revenir aux frontières pré-1967 et que les états arabes acceptent de reconnaître Israël, m'a semblé relativement simpliste.

Je reconnais cependant que j'ai vraiment eu du mal à comprendre l'accent du monsieur - même le blondinet ne comprenait pas tous les mots, et que j'en ai peut-être raté des détails. Les discussions à la sortie m'ont cependant confortée dans mon opinion.

En dehors de ça, et de sa description de la situation, Carter a insisté sur l'importance de la prise de position sur le conflit israélo-palestinien pour les prochaines élections, égratignant au passage le grand GiBi pour son désintérêt manifeste. Ceci étant, si Carter est assez réaliste pour bien savoir que quiconque veut jouer un rôle dans la résolution du dit conflit se doit d'être perçu comme neutre, je n'ai pas eu l'impression qu'il réalisait à quel point les Etats-Unis prennent parti pour Israël plus que n'importe quel autre pays.

Je salue néanmoins ses talents d'orateur - même si on ne peut pas vraiment en attendre moins de la part d'un ancien président. Il a été applaudi à plusieurs reprises au cours de son intervention, notamment quand il a proposé d'aider une délégation d'étudiants à aller se rendre compte de la situation sur place, et quand il a déclaré que la guerre en Irak était une des plus grandes erreurs militaires de l'histoire des Etats-Unis (flattant ainsi l'opinion publique qui s'est quand même retournée comme une crêpe à ce sujet pendant cette dernière année).

Quant à la séance de questions, je n'ose pas imaginer la qualité des cent-quatre-vingt questions parmi lesquelles la sélection a été effectuée. Qu'un étudiant en sciences politiques se demande si le fait que des groupes d'étudiants américains prennent position avec virulence pour l'un des deux pays et s'affrontent régulièrement soit verbalement, soit physiquement, mette en danger la paix au Proche-Orient, ça me dépasse déjà un peu. Considérer les campus américains comme susceptibles d'être à ce point le centre du monde que quiconque en Israël, en Palestine, en République Tchèque ou au Zimbabwe s'en préoccupe me semble légèrement déplacé. Que la question soit sélectionnée m'a vraiment ahuri - j'ai du demander aux gens autour de moi si j'avais bien compris.

Par ailleurs, je déplore l'absence totale de relecture des questions à la vue du discours précédemment prononcé ; poser des questions - certes pertinentes - mais auxquelles une réponse détaillée a déjà été donnée moins de dix minutes auparavant me semble éminemment impoli et peu professionnel.

Et je ne félicite pas les gens qui se sont barrés juste après le discours, montrant ainsi en toute grossièreté ce qu'ils pensaient de la séance de question, ce avant même d'en avoir eu un avant goût.

Notes

[1] non que je pense qu'il s'occupe mal du reste du monde, nuance