Chabbat par le menu
Lecteur, lecteuse, je te rassure tout de suite, j'ai survécu. J'ai même passé un très agréable moment puisqu'accueillie par des gens très sympathiques qui n'en n'ont pas fait toute une cérémonie mystique.
Vendredi soir vers 19h10 la mère de famille (et ma Chef) a vérifié une dernière fois ses emails. Puis elle a allumé les bougies de chabbat. Puis on s'est tous assis dans le salon, les trois enfants compris, pendant que chacun finissait de se préparer. En principe on se fait beau pour chabbat, on porte des vêtements différents de l'ordinaire ; la mère et le jeune fils étaient trop fatigués pour s'y intéresser, le père et les deux filles ont fait un effort de présentation. J'avais prévu de quoi me changer pour ne pas faire tache mais finalement je suis restée en pantacourt et t-shirt monstre ours, très classe.
Vers 20h une des sœurs de Chef est arrivée et nous nous sommes donc trouvés au complet, prêts à commencer le repas. On s'est tenus chacun à sa place derrière nos chaises. Le père a ouvert la bouche pour commencer sa prière, le fils s'est rendu compte qu'il avait oublié sa kippa et a détalé comme un lapin pour aller la chercher. Quand il est revenu le père a enfin pu en placer une, à toute vitesse d'ailleurs, je n'avais pas le souvenir que mon grand-père prononce si vite que ça, probablement parce qu'il ne parle pas hébreu tous les jours (ni ne prononce de prières si souvent que ça). Apparemment les autres savaient ce dont il retournait puisqu'ils ont bien dit amen aux bons moments. On a fait passé un verre de jus de raisin (normalement du vin, mais il y avait des enfants) autour de la table. Puis, dans un silence tout relatif, on est allés se laver les mains (à l'aide d'une petite cruche qui doit bien avoir un nom), puis la mère a coupé la tresse de pain, et enfin on a pu parler et manger normalement.
Le repas était bien évidemment casher. J'ai été nulle, je n'ai pas retenu les noms des plats, toujours est-il qu'il y avait une salade de crudités, du houmous, des courgettes à la tomate, des petits pains fourrés à la viande ou aux champignons, des schnitzels (aussi connus sous le noms d'escalope viennoise pour ceux qui se demanderaient), et probablement d'autres trucs qui me sont sortis de l'esprit. Après on a eu de la pastèque, du raisin et du gâteau chocolat-halva (le halva étant, toujours pour les cancres, du tahini au miel, le tahini étant lui-même une pâte de sésame). Le gâteau n'était pas le meilleur de la boulangerie, mais le seul sans crème ni lait, et le repas se devait d'être sans laitage puisque comportant de la viande et tu ne mangeras pas l'agneau dans le lait de sa mère.
Après quoi nous avons passé une soirée des plus normales à papoter, feuilleter le journal ou bouquiner. (Le père est d'ailleurs allé se remettre en short dès le repas fini.) J'ai remarqué que personne ne se gênait pour ouvrir et fermer les portes, par contre on m'avait recommandé de ne pas toucher aux interrupteurs du couloir ou de la salle de bain, ce à quoi je me suis bien évidemment conformée.
Le lendemain matin je suis partie vadrouiller dans Jérusalem pendant que la famille se rendait à la synagogue ; une synagogue assez progressiste, puisque la cadette des gamines allait y lire un passage de la Torah malgré son double chromosome X. Je n'ai donc rien suivi de cette journée, mais savais que personne ne conduirait, ne parlerait au téléphone ni ne regarderait la télévision.
Je les ai rejoint un peu avant le dernier repas de chabbat, qui fut fort simple. Vers la fin, les enfants étaient très excités et n'en pouvaient plus d'attendre que cela soit fini ; leur oncle venu nous tenir compagnie n'aidait en rien, car apparemment il ne pratique pas trop ; et tout le monde avait un œil sur la montre en attendant l'heure fatidique... J'ai même raté la prière de sortie de chabbat puisque j'étais partie faire pipi, c'est dire le temps que ça a pris, le temps que je sorte des toilettes c'était une affaire pliée.
Et puis la ville s'est réveillée, comme j'ai pu immédiatement le constater alors que le père, qui se rendait à son bureau travailler un peu (il est professeur, le pauvre, il faut le comprendre, privé d'étude sérieuse pendant un peu plus de 24h !) me raccompagnait à la gare quelques minutes seulement après la fin du chabbat ; les rues se gorgeaient déjà de monde et d'embouteillages...
Enfin, les mirettes pleines d'images de Jérusalem (je vous raconterai sans faute), je pris place parmi les jeunes militaires de retour de permission qui occupaient la majeure partie du bus, et m'assoupis aux côtés d'un fusil mitrailleur...
(Otir, ou quelqu'un d'autre d'ailleurs, n'hésitez pas à me corriger si je dis des bêtises ou à apporter des précisions...)