Hier soir j'ai dîné avec une poignée d'amis du boulot — et pris au passage des nouvelles de nos nouveaux locaux; ayant obtenu confirmation que non, il n'y a presque pas de lumière du jour dans mon nouveau bureau, je suis joie, je suis ravissement, je suis exultation, tu le vois mon bonheur dans ta gueule?.

A la veille des présidentielles françaises et des législatives grecques, et avec un citoyen de chacun des deux pays à la table, plus une poignée d'Allemands et un Italien, la conversation s'est naturellement portée sur la politique européenne, les conséquences potentielles du départ (potentiel lui aussi, mais chaudement espéré) d'une moitié du couple Merkozy sur l'Union, et autres considérations joviales et primesautières.

Après quoi on a ouvert la quatrième bouteille de vin et tout est allé mieux.

Le problème majeur de ces conversations, finalement, c'est qu'elles ont éveillé en moi un espoir que je croyais rendu impossible par la triste colère des années passées, par ma rage impuissante et sans cesse renouvelée à la lecture des journaux, par un réalisme cynique qui s'efforce de transformer en résignation la petite flamme qui brûle encore là-dedans. Pas l'espoir de vivre au pays des Bisounours, non, ne poussons pas ; mais l'espoir que ce sera mieux, enfin, moins pire, quoi, que les choses arrêteront d'aller aussi mal, peut-être, qu'on nous jettera moins de mépris vulgaire et d'intolérance crasse à la gueule.

Et cet espoir, je n'en veux pas vraiment, non seulement parce qu'il sera nécessairement déçu (qu'il soit tué dans l'œuf dès ce soir ou lentement étouffé au cours des mois et des années à venir), mais aussi parce qu'en venir à espérer que le Président de la République Française soit, tout simplement, un type capable de s'exprimer avec correction est quand même plus que déplorable.

Et je me répète comme un mantra que quoi qu'il en soit, quelle que soit l'issue de ces élections, je m'en fous, je me tire au soleil. Et que personne n'essaie de se mettre entre moi et ma joie d'aller passer trois semaines aux Stazunis avec des gens chouettes, de la science et mes souvenir. Nom d'une bite.