There's space for us to shake and hey I like that tune
Gens.
Après mes folles aventures américaines, je suis partie me remettre de tout ça en vacances.
Prendre un avion pour se remettre d'avoir vu neuf aéroports en trois semaines, partir à un endroit où on vit quatre à cinq heures plus tard qu'en Germanie pour se remettre du décalage horaire, je suis pleine d'idées brillantes : je suis donc partie à Barcelone pour Primavera Sound.
Une mise en abyme extrêmement osée : on voit le reflet du bracelet jaune qui me garantissait l'accès au site du festival
C'était fantastique.
Pendant une semaine, j'ai eu l'activité intellectuelle d'un pétoncle. Je n'ai pas pensé au tourbillon de ces dernières semaines, je n'ai pas pensé à mon boulot, je n'ai pas pensé à ce que je veux faire de ma vie, je crois bien que je n'ai pensé à rien. J'ai même laissé les gens prendre la plupart des décisions qu'est-ce-qu-on-fait-on-va-voir-quoi (sauf pour Absynthe Minded et Miró, parce qu'il y a des trucs sur lesquels je ne transige pas).
Miró
Je me suis baladée le nez en l'air, j'ai pris des photos stupides[1], j'ai parlé de tout et de rien avec les copaings, j'ai ri, j'ai mangé des tapas et des glaces et des fraises et des cerises et suffisamment de bellota pour quelques années mois semaines, j'ai bu du rioja, de la sangria, et des sous-bières[2], j'ai baragouiné en spanitalien mâtiné d'allemand, j'ai battu des mains devant Miró[3], et puis je me suis mis de la musique plein les oreilles (par delà les bouchons), j'ai dansé pendant des heures, et le tout en plein air au bord de la Méditerranée.
Le nez en l'air, à Barcelone, il y a des palmiers.
Ou des cathédrales gothiques.
Je considère parfaitement légitime de massacrer l'espagnol tant qu'ils s'escriment à le faire aussi en parlant catalan. (J'ai beaucoup de respect pour les langues régionales, mais le catalan, je veux dire, sérieusement, « sortida », ils le cherchent un peu, que je me moque d'eux.) Enfin ça n'empêche pas certains d'être anti-capitalistes, c'est déjà ça.
J'ai surkiffé.
Julot le Lion de Belfort (dit Julot) et Johann Nepomuk Eduard Ambrosius Nestroy (dit Nepo) aussi ont surkiffé.
Alors musicalement, ça a donné quoi ? Ben, trente-deux concerts en cinq jours. Alors, non, je ne les ai pas tous vus en entier (surtout The Cure, qui a duré, quoi, douze-treize heures[4]). Mais quand même, pour quelqu'un qui voit d'habitude un grand max de trois-quatre concerts de rock par an... heureusement que j'ai pris des notes sur mon programme, ça me permet de partager.
Y avait deux, trois personnes.
Dans la catégorie Dis, c'est bientôt fini ? Quand est-ce qu'on s'en va ?:
- The Wedding Present Les gens autour de nous ont sauté sur l'occasion d'inhaler de la bière en intraveineuse et de manger des cigarettes qui font rire, mais comme on était beaucoup plus sages que ça, ben on s'est fait chier.
- Black Lips Bizarrement, j'ai un album d'eux que j'aime bien, mais en vrai, j'ai trouvé ça loooong comme les vingt-deux stations Neuilly Vincennes.
- Peter Wolf Crier Chais plus trop, mais j'ai trouvé que c'était le bon moment pour faire une pause toilettes, et puis m'asseoir par terre, et puis lire la suite du programme.
- The Field On m'avait promis que c'était dansant comme tout, je sais pas si c'était parce que c'était à 3 heures du matin, mais je dansais tellement pas que je suis allée m'asseoir et je suis vraiment pas difficile quand il s'agit de danser.
- The Afghan Whigs On a abandonné Field Music pour aller voir si c'était bien, on a dit « woooow y a plein de monde », on a écouté deux chansons et on est retournés voir Field Music.
- Shellac C'était une erreur, je croyais avoir bien aimé en écoutant le matin, mais clairement j'avais confondu avec un truc qui n'était pas du gros post-hardcore bourrin ousque t'as besoin de mettre tes bouchons d'oreille avant même de voir la scène.
Dans la catégorie Tellement nul que c'en est légendaire :
- DJ Coco On a ri aux larmes.
Dans la catégorie Cool. Quelqu'un veut une bière ? :
- Franz Ferdinand J'aime beaucoup Franz Ferdinand, je connaissais quasiment tout ce qu'ils ont joué, j'ai sautillé sur place avec enthousiasme comme tout le monde (y compris le mec qui m'est retombé trois fois sur le pied), mais ça m'a pas plus émotionnée que ça, en fait.
- The Cure Ils ont joué leurs chansons les plus connues à la fin, on a vu que le début, et clairement je connaissais pas assez par rapport au reste du public.
- Wild Beasts C'était pas mal, mais j'en ai pas vu assez pour juger.
- Afrocubism C'est là que ma carte mémoire est tombée en rade, alors j'étais pas d'humeur.
- The War on Drugs Je voulais les voir, je suis allée, le lendemain j'avais déjà oublié à quoi ça ressemblait. Woops.
Dans la catégorie J'aime beaucoup ce que vous faites mais la logistique est pourrie :
- Jeff Mangum. La prochaine fois que vous faites payer deux euros en plus aux gens qui veulent s'assurer de pouvoir rentrer, ce serait coule de les faire rentrer avant le début du concert, MERCI.
Dans la catégorie Des trucs chouettes qu'il faut que j'écoute plus souvent :
- Jeremy Jay Le coup d'envoi pour nous. J'en ai tiré trois conclusions : (1) ça va être BIEN (2) je vais avoir mal aux pattes (3) faut que j'achète des bouchons d'oreilles.
- John Talabot Il était tard, je croyais que je n'avais plus l'énergie que de me traîner jusqu'à mon lit, et en fait, non.
- Siskiyou I got love to give, and give, and give, and give, and give, and give
- I Break Horse Des Suédois que je n'écoute pas assez parce que j'étais persuadée qu'ils étaient Danois. (C'est pas vrai j'écoute bien The Asteroid Galaxy Tour en boucle.)
Dans la catégorie Hell to the fucking yeah! :
- The Walkmen Gros gros bisous à Björk, merci de ne pas être venue, la solution de secours était achtement chouette.
- Absynthe Minded Y avait quasiment personne, ils ont commencé en retard, j'ai pris de belles photos qui ont disparu dans le Grand Crash de la Carte Mémoire, je les aime d'amour quand même, surtout Renaud Ghilbert, leur violoniste/altiste.
- Beirut On était assez devant et laisse-moi te dire que ça swinguait sévère.
- Field Music Que je confondrai hélas avec The Field jusqu'à la fin de mes jours, du coup.
- Girls J'ai pris très peur en lisant la page Wikipedia sur le groupe, qui m'a expliqué que le chanteur compositeur a été élevé dans la secte des Enfants de Dieu, a eu besoin d'années et d'années à explorer les nouvelles technologies, le punk hardcore et le nihilisme pour arriver à plus ou moins intégrer la société, et que sa rencontre avec un Californien qui faisait de la musique dans le garage de ses parents a conduit à la création d'un groupe aux sonorités des Beach Boys, d'Elvis Costello et de Buddy Holly. Je me suis laissée convaincre qu'y avait moyen que cette salade mène à quelque chose d'intéressant et j'ai adoré.
- M83 Il était tard. On a dansé au bord de la mer. C'était bien.
- Dirty Three Je suis pas difficile, on m'a dit, « écoute, y a du violon », j'ai écouté, j'ai aimé.
- Laura Marling Même si on a raté le début, et le milieu aussi. Au moins j'ai siffloté There's a boy across the river but alas I cannot swim toute la soirée au lieu du Lady Gaga que j'avais jusqu'alors dans la tête (oui, compte sur moi pour chantonner Po-po-po-po-po-po-po-poker faaaace alors qu'on me fait bouffer du rock indé par les narines).
- Sharon Van Etten On m'avait dit « Il faut aller écouter Sharon Van Etten ». On avait raison.
- Veronica Falls Y avait la lumière du soleil en fin d'après-midi, la brise de bord de mer qui va avec, des mouettes dans le ciel... oui, la musique était chouette aussi.
- Dominique A Une de mes premières cassettes audio, quasiment pas écouté depuis cette époque, ben je sais pas pourquoi.
- Chromatics. J'étais pas la seule à aimer, à voir la photo ci-dessus.
- Yo La Tengo. J'étais pas convaincue au début — je ne les ai même pas reconnus au début — et puis... ouais. Ah ouais. Ça a envoyé du steak.
Dans la catégorie Des étoiles plein les yeux, mode groupie :
- Kings of Convenience On y était une demi-heure à l'avance, pour être tout devant. Y avait une Espagnole à côté de moi bien plus hardcore que moi, qui connaissait toutes les paroles et qui a limite fait pipi dans sa culotte quand ils ont joué sa chanson préférée (alors que moi je me contentais de sauter sur place, battre dans mes mains et crier dans les aigus de manière sobre et distinguée). A la fin j'avais plus de voix et des étoiles plein les yeux.
- Kings of Convenience, the B-sides show J'étais donc plus que partante pour recommencer le lendemain. C'était dans une petite salle au lieu de sur une grande scène, plus intime, plus d'interaction avec le public, ils ont joué un peu plus au feeling, des vieux trucs de Quiet is the New Loud et du tout nouveau aussi, et puis la Panthère Rose. On était vers le fond, j'étais moins surexcitée mais je crois que j'ai encore plus apprécié.
- Kings of Convenience DJs On a attendu qu'ils se remettent de leur concert dans l'ambiance irréelle d'une boîte de nuit avec des gens assis par terre en train de taper la discute (y avait du Gotan Project qui jouait en fond, j'étais la seule à avoir envie de danser). Et après, ils ont mis le feu au dancefloor, selon l'expression consacrée.
Petit cœur petit cœur
On remet ça l'année prochaine ?
Notes
[1] dont j'ai perdu la moitié dans un accident de carte mémoire, j'essaie de la récupérer mais à ce rythme ça va durer trois-quatre ans dont je ne compte plus dessus.
[2] Le jour où un festival de rock se fait sponsoriser par une micro-brasserie ou des bières d'abbaye, tu m'appelles.
[3] Devine comment j'ai appelé le thème qui décore les murs d'AmRhaps depuis plusieurs années maintenant ?
[4] Trois, en fait. Nous on en a duré une.