Le concert était cette fois à la Salle des concerts (anciennement salle des concerts de la Cité de la Musique, mais ce n'est pas pour autant que j'y avais déjà mis les pieds). On y est relativement bien assis, d'autant plus que comme il fait chaud, on peut se servir de son manteau et de son pull pour se caler les reins. (Oui, bah tu te traines une hernie discale pendant plus de sept ans et on s'en reparle.)

Tout d'abord, La Symphonie pour cordes n°8 de Felix Mendelssohn. Ça, c'est celle où le deuxième mouvement est principalement joué à l'alto, ici avec un alto solo, deux deuxièmes altos, un violoncelle et une contrebasse, une formation suffisamment petite pour qu'il soit étrange de la voir dirigée par un chef plutôt que jouée en formation de chambre. Autant te dire que je m'en pourléchais les babines d'avance, à raison.

Roberto Forés Veses, dirige de façon extrêmement élégante. Ses mouvements amples partent de l'épaule, même de loin et de dos je comprends sa battue. Je le prends immédiatement en grippe, sans avoir pour cela la moindre justification. Il fait faire de la très jolie musique à son orchestre, mais j'ai le sentiment que je détesterais travailler avec lui.

Je suis particulièrement impressionnée par la posture d'une des violonistes. Ses gestes sont ronds, élégants, on dirait vraiment qu'il n'y a rien de plus naturel pour elle que de jouer du violon. J'étais d'autant plus impressionnée que j'ai récemment réalisé à quel point la position prise pour tenir un violon ou un alto n'est pas naturelle (j'ai fait essayer mon biniou à une amie pianiste, pour laquelle il était tout bonnement impossible d'adopter la position que mon bras gauche prend depuis plus de vingt ans sans y songer).

Ensuite, Rêves et Prières d'Isaac l'Aveugle, d'Osvaldo Golijov. Une création contemporaine, inspirée du Klezmer et de la culture yiddish, et des écrits (dictés, plus exactement, le « l'Aveugle » n'était pas là pour faire joli) du plus grand rabbin cabaliste de Provence m'indique le programme (faisons, toi et moi, la liste des rabbins cabalistes de Provence connus : 1. Isaac l'Aveugle ; 2. Abraham ben Isaac de Narbonne ; 3. Euh ?). Romain Guyot, dont je trouve le jeu excellent (mais bon avec la clarinette je suis peut-être peu exigeante, l'instrument est tellement beau), alterne entre trois instruments, que je suppose être une clarinette basse, une clarinette alto et une clarinette en si♭. Le deuxième mouvement, évocateur du yiddish selon le compositeur (et son père, qui se serait écrié « tu remets ça ! Encore un accord yiddish ! » alors qu'il écrivait ce mouvement), est celui qui me plait le plus, probablement parce qu'il est le plus proche du klezmer traditionnel. Le dialogue entre le violon solo et la clarinette me plait beaucoup, ainsi que les cadences tellement rompues qu'on dirait qu'il y en a des petits bouts partout. Finalement, la seule chose qui me déplait dans ce morceau est l'utilisation du col legno dans le premier mouvement; je sais bien que ça fait moderne (bien qu'on en trouve dans Chopin, Berlioz, Mahler ou Moussorgski), mais elle me parait ici mal à propos.

La salle est enthousiaste et le concert se termine sur un très beau rappel : une gnossienne de Satie, dans une version pour clarinette et orchestre à cordes. Ce beau cadeau, bien que peu judaïsant, se fond parfaitement dans l'atmosphère onirique instaurée par le Golijov.

Je ressors encore une fois enchantée. Merci les copaings !