Denver, Colorado II
Je suis de plus en plus en retard sur les détails de la Convention Nationale Démocrate, mais j'ai enfin trouvé pris le temps de regarder les discours de Bill Clinton et Joe Biden et j'ai encore plein de choses à dire. Comme j'ai un manuscrit à réécrire (j'ai presque trouvé ça drôle quand Advisor a tout cassé le nouveau plan de mon co-auteur favori pour en revenir à la structure que j'avais mise en place initialement et que ce dernier avait démoli en me tirant des larmes de sang), il est de toute évidence que je me retrouve dans l'incapacité complète de faire quoi que ce soit d'autre que de causer de ces deux discours, là, maintenant, tout de suite et que ça saute.
Le discours de Bill Clinton était beaucoup plus proche de ce que j'attends d'un discours politique que ce que j'avais pu voir jusqu'à présent dans cette convention (pas seulement Michelle Obama et Hillary Clinton, mais je ne suis pas analyste politique non plus je ne vais pas tout vous raconter en détail) : beaucoup de politique, un petit peu de sentiments, une ou deux blagues :
The campaign generated so much heat it increased global warming.
Cette campagne a été tellement chaude qu'elle a augmenté le réchauffement climatique.
Comme sa femme, il a pour tâche ardue de rallier les partisans d'Hillary Clinton à Obama, ce à quoi il s'est attelé de deux façons. D'une part, il a attaqué sans relâche les Républicains, dressant le bien piètre bilan des huit dernières années, et McCain lui-même. De l'autre, il a fait jouer son expérience quasi-unique d'ancien président Démocrate (il ne reste, à part lui, que Jimmy Carter qui soit encore en vie) pour justifier de la qualité de son jugement sur Obama, qu'il estime avoir les qualités nécessaires à résoudre les deux problèmes majeurs dont le pays souffre selon lui actuellement : l'effondrement du rêve américain, et le déclin du leadership[1] des États-Unis dans le monde.
Voilà donc un point à rajouter à ma liste à puces d'hier, le leadership américain. Ils y tiennent, ils y croient, de même qu'en France on aime bien redresser la tête, se rengorger, et chanter cocorico en évoquant notre rayonnement à l'étranger... Montrer l'exemple et utiliser leur influence pour lutter contre l'armement nucléaire, le réchauffement climatique et les maladies (Bill Clinton a ses favorites, SIDA, TB et malaria), et bien évidemment pour insuffler un vent de démocratie sur le monde (on voit comment ça marche bien d'ailleurs). Et Clinton y est même allé d'une phrase choc aussitôt reprise par tous les journalistes de la planète, reconnaissant qu'avant d'aller donner des leçons d'économie, d'accès aux soins, d'éducation et d'alimentation aux autres, il faut d'abord balayer devant sa porte, ce qu'Obama va donc faire :
People the world over have always been more impressed by the power of our example than by the example of our power.
Partout dans le monde les gens ont toujours été plus impressionnés par le pouvoir de notre exemple que par l'exemple de notre pouvoir.
On aura compris que McCain aime bien faire preuve de son pouvoir, tandis qu'Obama préfère donner un puissant exemple.
Par ailleurs, Bill Clinton a aussi rappelé que certains des reproches faits à Barack Obama lui avaient été adressés à lui en 1992 (non, pas le fait d'être noir, ni celui d'avoir un père Kenyan, ni d'avoir un deuxième prénom sous-entendant qu'il était peut-être musulman) ; ses détracteurs l'estimaient en effet à l'époque trop jeune et inexpérimenté pour un rôle aussi important que celui de Commandeur en Chef. Au passage, je trouve ça curieux qu'on les accuse, l'un comme l'autre, d'être trop expérimenté pour être chef des armées mais pas pour diriger la nation. C'est peut-être parce que les Américains se servent plus de leur armée que la France, celà dit.
Assez parlé de Bill, passons à Joe Biden. Je l'ai trouvé très bon orateur, et plutôt sympathique (je me méfiais un peu du Delaware, le Delaware, c'est l'état qui a de loin la meilleure politique fiscale pour les entreprises, au point que la plupart des industries du pays ont leur siège social dans cet état — même si l'ensemble de leur activité est sis en Californie, au hasard. En plus ils sont tellement riches, dans le Delaware, avec toute leur activité portuaire, qu'ils n'ont même pas de TVA). Rendant hommage à sa maman (présente dans l'assistance), il a renversé la tendance « parlons affaires » de Bill Clinton (ça commence à me porter sur les nerfs, ces famille qui me forcent à écrire les prénoms de tout le monde pour que l'on sache de qui on parle ; heureusement il semble que Jill Biden, professeur d'anglais, soit plus portée sur le combat pour l'éducation que pour le discours politique de convention démocrate, menfin Beau Biden[2] étant attorney général et ayant d'ailleurs brièvement présenté son père, nous ne sommes pas à l'abri) et encore une fois humidifié quelques paires d'yeux.
Il y est aussi allé de sa petite blague :
George... excuse me, John McCain... freudian slip, freudian slip!
George... pardon, John McCain... lapsus freudien, lapsus freudien !
J'ai relevé trois axes importants dans son discours. Un, taper sur les Républicains, à grand coups d'effondrement du rêve américain[3], de bilan désastreux du gouvernement Bush, et d'attaques du programme de McCain, qui ne semble apporté aucun des changements promis. Il l'a martelé à de nombreuses reprises,
That's not change, that's more of the same!
Ce n'est pas du changement, c'est encore plus de la même chose !
Deux, vendre Obama, notamment en rappelant comme d'autres avant lui qu'en sortant d'Harvard, il s'est engagé dans les quartiers de Chicago durement touché par les fermetures d'aciéries plutôt que d'aller faire des gros sous à Wall Street, et en insistant sur le travail qu'il a mené en Illinois, permettant à de nombreuses familles de passer de l'aide sociale à la dignité de l'emploi.
Trois, se vendre lui-même, discrètement, comme futur vice-président, en causant beaucoup d'affaires étrangères, son point fort censé compléter la faiblesse de Barack Obama dans le domaine. Cela lui a permis de rappeler qu'il était spécialiste, qu'il connaissait, qu'il en parlait naturellement, tout en insistant sur le fait que par le passé, Obama a vu plus juste que McCain sur de nombreux points de politique extérieure.
Et avec tout ça il y a encore plein de discours que je n'ai pas regardés, mon papier n'a pas avancé d'un iota, et saviez-vous qu'ils ont ressorti Stevie Wonder ?
Notes
[1] je m'excuse de ne pas trouver de mot plus approprié en français
[2] On ne se moque pas de son prénom, qui est un surnom, son vrai nom étant le même que celui de son papa, Joseph Robinette, ne me demande pas.
[3] je ne sais pas comment ces gens feraient de la politique sans leur rêve. C'est un peu comme si on nous ressortait Jeanne d'Arc et la prise de la Bastille à la moindre occasion – notre président actuel ce n'est pas du tout pareil, il s'arrête à la Seconde Guerre Mondiale.