Je ne chouine pas, je dors
Aujourd'hui j'ai réussi à être au labo de 11h à 15h30.
De 11h à 11h20 je me suis remise de la fatigue du trajet. De 11h20 à 11h45 j'ai travaillé et lu les quarante-trois derniers titres du Huffington Post dans mon agrégateur. De 11h45 à 12h15 j'ai bossé avec deux collègues et Advisor (« Ça va ? Tu tiens le coup ? — Ça va, je suis épuisée mais je me tiens au mur. »). De 12h15 à 13h15 j'étais en pause déjeuner. De 13h15 à 13h30 je me suis remise de la fatigue du trajet retour de la pause déjeuner. De 13h30 à 14h j'ai discuté de la grève des enseignants-chercheurs en France avec le post-doc français (à ce propos, il faudrait écrire un article, mais je suis trop fatiguée). De 14h à 14h30 j'ai travaillé et lu les vingt-cinq derniers titres du New York Times dans mon agrégateur, ainsi qu'un des articles, j'ai oublié lequel. De 14h30 à 15h j'ai bossé avec les deux collègues précédemment cités (quand je n'étais pas en train de m'endormir). De 15h à 15h30 j'ai bossé et raconté des bêtises sur MSN.
Le reste du temps, je végète, je dors, je lis, je me repose d'avoir lu, je regarde Jeopardy à la télévision mais je n'ai même pas le temps de comprendre la réponse que quelqu'un a déjà trouvé la question, etc. La bonne nouvelle est que je n'ai presque plus mal à la gorge, mais en fait je n'ai pas vraiment le courage de manger autre chose que de la soupe malgré tout.
A propos de la grève des enseignants-chercheurs, tout de même, quelques points (avant que je ne m'endorme sur mon clavier).
- Les enseignants-chercheurs, dans leur immense majorité, ne sont pas des flemmards, ils ont des emplois du temps monstrueux entre recherche, enseignement, emmerdes administratives et recherche de financements, et engagements divers et variés. S'imaginer que les profs de facs en font encore moins que les profs de lycée parce qu'ils donnent moins d'heure de cours, c'est se foutre le doigt dans l'œil jusqu'à l'omoplate.
- Les enseignants-chercheurs, dans leur immense majorité, n'ont pas peur d'être évalués, ils refusent de l'être sur des critères vides de sens (évaluation d'élèves pas nécessairement super matures, nombre de citations / publications dont la signification varie énormément d'un domaine à l'autre, et par domaine je veux dire quelque chose de beaucoup plus précis que « informatique » ou « physique », évaluation par des industriels qui, nécessairement, s'intéresseront beaucoup plus à la recherche très appliquée qu'à quoi que ce soit d'un peu explorateur ou, Dieu nous en garde, fondamental...).
- Même le modèle américain dont on nous rebat les oreilles injecte beaucoup plus d'argent public dans la recherche que le système français actuel (toutes proportions gardées, et alors même que la recherche américaine elle-même est au plus bas) ; les enseignants-chercheurs n'ont pas peur d'être en partie financés par le privé, ils ont peur d'être privatisés, ce qui n'est pas du tout la même chose.
- Les enseignants-chercheurs refusent que les présidents d'universités aient les pleins pouvoirs qu'on s'apprête à leur donner, notamment celui de décréter que, ouais, la recherche, c'est joli, mais deux heures par semaine ça devrait largement te suffire non ? (Notons au passage qu'un enseignant qui n'a pas le temps de chercher n'a pas le temps de se mettre au goût du jour et enseigne des choses complètement dépassées.)
Par ailleurs, si vous êtes en mal de pétition à signer, allez-donc sauver le Planning Familial de la faillite ou empêcher qu'on ne colle en taule à tour de bras des enfants de douze ans.